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Angela Davis, une histoire des États-Unis

© Jérémie Lévy

Texte de Faustine Noguès, mise en scène et scénographie Paul Desveaux, avec Astrid Bayiha – compagnie L’héliotrope, au Théâtre Paris-Villette.

C’est un portrait de femme, militante communiste, pacifiste et féministe, professeure de philosophie, qui dès sa jeunesse défend ardemment les droits humains, particulièrement ceux des minorités. Née en 1944 à Birmingham, en Alabama, dans un quartier où le Ku Klux Klan pose fréquemment des bombes, Angela Davis entre au cœur des discriminations raciales dès l’école primaire qu’elle fréquente, réservée aux Noirs et moins dotée que l’école des Blancs. Elle passera sa vie à s’interroger sur les raisons des discriminations, d’autant quand elle part dans une école secondaire privée de New-York située à Greenwich Village et basée sur les principes de l’éducation nouvelle. Dès lors elle entend parler de communisme et commence à militer dans une organisation de jeunesse marxiste-léniniste.

Le montage du texte, Angela Davis, une histoire des États-Unis s’appuie sur l’autobiographie qu’Angela Davis a rédigé, certains de ses discours, des archives vidéo et l’écrit de Faustine Noguès. Le spectacle débute par la référence à la violence policière américaine qui a mené à la mort de Georges Floyd, devenu figure emblématique, cet « homicide justifié » comme certains le nomme. Suivent quelques images d’une interview fictive réalisée par Paul Desveaux le metteur en scène interrogeant l’actrice, Astrid Bayiha, qui incarne brillamment Angela Davis et parle de ses prises de position et de la non-violence qu’elle défend.

Elle est pourtant très vite surveillée par le FBI et poursuivie par la justice suite à la tentative d’évasion de trois prisonniers qui prennent un juge en otage et se conclut par sa mort, en août 1970, tué par l’un des fusils qu’elle avait achetés deux jours auparavant. Emprisonnée pendant plus de seize mois après une courte cavale malgré la réprobation des intellectuels du monde entier, elle sera ensuite acquittée et poursuivra une carrière universitaire basée sur la philosophie féministe et les études afro-américaines. « Je théorise la lutte » dit-elle dans son envie de transformer le monde et sa rencontre avec les textes entre autres de Marx, Sartre et Marcuse.

De l’écran au plateau l’actrice défend avec conviction les étapes de l’engagement de son personnage : son activisme au sein du Black Panter party, sa lutte contre les inégalités et discriminations aux États-Unis, la violence et les injustices. C’est de France où elle séjourne qu’elle est informée, en septembre 1963, d’un attentat qui a frappé l’église baptiste de sa ville de Birmingham. Quatre jeunes filles ont été tuées, elle en connaissait trois. La révolte gronde pour elle. Cette révolte est aussi portée par celle de Rosa Parks évoquée dans le spectacle qui, petite n’avait pas accès aux transports scolaires, interdits aux enfants de couleur et regardait passer les bus chargés des élèves blancs. Plus tard, adulte, elle eut une violente altercation pour avoir refusé sa place à un Blanc et elle commente « J’avais 42 ans. Mais s’il y avait bien une chose qui me fatiguait, c’était de courber l’échine. » La ségrégation battait son plein. La liste des brimades quotidiennes est longue.

© Jérémie Lévy

Sur scène, l’actrice incarne Angela Davis dans tous ses combats, elle qui reconnaît porter la triple peine qu’elle énonce : être noire, communiste et femme. Elle est son propre chef d’orchestre et, micro en main, navigue du pupitre-son placé à côté d’elle au récit, au slam et au chant avec beaucoup d’aisance et de talent. Sa voix jazzy, son balancement et sa détermination apportent les variations d’ombre et de lumière aux situations, au personnage. Elle est accompagnée dans la démarche musicale de Blade MC Alimbaye, poète, slameur et rappeur et c’est très réussi. Angela Davis, une histoire des États-Unis est un travail courageux sur la défense des droits civiques et de l’égalité pour tous, porté par une équipe. La dernière image repart sur l’interview du début, fermant ainsi le spectacle mais laisse ouvert les vigilances à garder et les combats à mener.

Brigitte Rémer, le 5 juin 2022

Avec : Astrid Bayiha, en alternance avec Flora Chéreau – spectacle réalisé sur une idée originale de Paul Desveaux et Véronique Felenbok – assistante à la mise en scène Ada Harb – création musicale et coaching chansons Blade AliMBaye – lumière Laurent Schneegans – images Jérémie Lévy – régie générale Johan Allanic.

Du 31 mai au 4 juin 2022 au Théâtre Paris-Villette. Sites : www.theatre-paris-villette.fr et www.heliotrope-cie.com En tournée : 7 au 31 juillet 2022, Théâtre des Halles, Avignon –  20 et 21 septembre 2022, Princeton (États-Unis) – 30 septembre au 4 octobre 2022, Massachusetts International Festival of the Arts (États-Unis).